La "lettre de 12:15" du Monde (par email, nouvelles économiques) a comme sous-titre :
Résultats dans le vert pour la Société Générale.
Ce qui est surprenant dans cette nouvelle, c'est la manière dont elle est présentée : ce n'est pas le montant des bénéfices de la SG qui fait l'information, semble-t-il, c'est le simple fait que la SG soit profitable. Aurais-je raté quelque chose ? Je ne pense pas que la SG ait été dans le rouge ces dernières années (ou trimestres) . De fait, Yahoo nous dit que le bénéfice net par action a toujours été respectable : sur les 3 dernières années, de 5 à 10% du cours de l'action.
On pourrait imputer cette présentation à l'erreur d'un pigiste---et c'est peut-être le cas. Et que ce soit la SG ou n'importe quelle société, peu m'importe ; ce qui est intéressant, c'est ce que ce cas suggère : la profitabilité d'une entreprise est encore considérée comme une information digne d'être mentionnée en France. C'est cette même perception collective qui explique la fortune du concept de "licenciement boursier" : pour les Francais, une entreprise doit simplement se maintenir à flot---aller au-delà est le signe de l'existence de rentes de monopole (version sophistiquée) ou d'avidité antisociale (version naïve). Le droit du travail incorpore d'ailleurs ce concept très officiellement, lorsqu'il énonce qu'un licenciement économique peut être "injustifié" s'il a pour but d'améliorer la profitabilité de l'entreprise, plutôt que de rétablir sa viabilité.
C'est vraiment très curieux : la détention d'actions "en direct" reste minoritaire en France, mais de nombreux Francais possèdent des actions par l'intermédiaire de SICAV et autres. Selon la Banque de France, 10 millions de Francais possèdent des valeurs mobilières (moins de 15 000 euros, pour les trois-quarts d'entre eux) ; et ce chiffre ne comprend pas les actions détenues par l'intermédiaire d'une assurance vie. Il est donc à présumer qu'il existe un groupe important de Francais qui vivent une dissonance cognitive entre leur réprobation des entreprises qui font des profits et leur désir, heureusement rarement décu, que leurs actions aient une valeur positive...dilemme Cornélien.
Bien vu. Le biais plutôt peu favorable à ce qui est libéral est une marque de fabrique dans la presse française et même dans les autre médias... C'est sans doute le décalage cognitif des élites issues de 68 avec le pays réel...
Rédigé par : Jules | 09 novembre 2006 à 16:10
plusieurs remarques:
-le titre du monde est réducteur, voire simpliste, comme souvent dans la presse
- la jurisprudence de la cour de cassation, il y a quelques mois, vient d'accepter l'augmentation de la profitabilité comme justification de licenciements économiques
-la notion de "juste profitabilité" est difficile à définir...les épargnants des SICAV ne demandent pas du 15% de rendement sur capitaux propres, mais un peu plus que le livret A, rémunéré à 3%...chaque français est tenté par le loto boursier mais laplupart savent qu'ils ne doit pas compter sur d'hypothétiques plus values démentielles pour s'assurer une épargne stable et rémunérée pour leurs projets, retraite, enfants... ils s'indignent lorsque la stratégie de l'entreprise a pour objectif de faire passer la renatbilité à deux chiffres endélocalisant, licenciant, et je ne suis pas certain qu'ils aient tort.
-quand au biais "antilibéral" des médias, j'écoute france inter (parfois qualifié de gauchiste) entre 7 et 8h et à cette heure d'audience maximale, j'entends deux éditorialistes économiques: jean marc sylvestre par ailleurs salarié de TF1, qui met toute son autorité à convaincre qu'une france sans prélèvements obligatoires, code du travail, et autres freins à l'innovation, avec des frontières toutes ouvertes serait bien meilleure pour les entreprises, et donc pour nous qui n'y comprenons rien, et brigitte jeanperrin , rapporteuse de la mondialisation heureuse et interviouveuse lisse des actions de communication des patrons français...
le vendredi pour "équilibrer" bernard maris a doit parfois à un débat contre un économiste "raisonnable"...
à mon sens, tous les éditorialistes des grands médias, presse écrite ou radio, télé, sont, globalement libéraux, dans le dogme, la doxa, on l'a vu au moment du référendum sur le TCE...
il est vrai par contre que les correspondants "société", les reporters terrain qui eux, rencontrent, en aval, ceux qui subissent et souffrent amènent en général un contrepoint de vue intéressant...
FRANCIS
Rédigé par : francis | 10 novembre 2006 à 05:21
La question est plutôt : est-il normal pour une entreprise d'avoir pour unique objectif d'accroître sans cesse et par tous les moyens sa rentabilité ?
Premièrement, qu'est ce donc qu'être "profitable" ? Ce mauvais franglais cache mal la notion de rentabilité. Mais peut-être vaut-il mieux dire profitable que rentable ? Quoi qu'il en soit, la rentabilité, c'est pour l'actionnaire, pas pour l'entreprise.
Est-t'il donc normal qu'une entreprise cherche avant tout la progression des dividendes pour ses cationnaires, par des moyens parfois déconnectés de toute réalité industrielle, tel que le rachat de ses propres actions, une politique agressive envers les fournisseurs, ou les fameux "licenciements boursiers" ?
Il y a quand même quelquechose de malsain à ce que les entreprises côtées ne vivent que pour leur cours en bourse et le montant des dividendes.
Caricatural ? Vraiment ?
Autant une entreprise n'a pas pour unique objectif de se "maintenir à flot", autant elle n'a pas vocation à faire 15% de croissance par an indéfiniment.
YR
Rédigé par : YR | 11 novembre 2006 à 04:12
C'est une erreur d'appréciation : le journaliste a lu tous les papiers d'économistes et en a fort justement déduit que la concurrence est parfaite sur les marchés et que donc les entreprises ne font pas de profit, il s'etonne donc publiquement de voir une entreprise faire des profits :).
Ceci dit le fait qu'une entreprise soit profitable ne veut pas dire qu'elle va faire des profits sur chacun des quatres trimestres de l'année.
Rédigé par : Laurent GUERBY | 11 novembre 2006 à 10:58
OUI
Rédigé par : patrick | 11 novembre 2006 à 14:18