Français, on vous cache des chiffres effroyables ! J'ai trouvé sur le site de l'Insee une page bien cachée qui fait état d'une extraordinaire flambée des prix entre... 1914 et 1985. Un franc de 1914, nous avoue l'Insee, vaudrait 2,95 euros d'aujourd'hui, alors que le franc de 1985 ne vaudrait plus que 25 centimes d'euro, soit 12 fois moins. Une hausse des prix de 1 100%, donc ? Non, c'est pire ! Les Français ont la mémoire courte, c'est entendu ; mais certains vieillards chenus se souviennent de 1960, quand le pouvoir a subrepticement enlevé deux zéros au franc. Le franc de 1985 valait donc en fait 1 200 fois moins que celui de 1914, soit une hausse des prix vertigineuse de 120 000%.... 10,5% par an en moyenne.
A part pour les malheureux rentiers qui ont fort mal pris cet épisode inflationniste, les conséquences internes de cette inflation ont été moins graves que ces chiffres abasourdissants ne le laisseraient penser. En revanche, ils traduisent aussi une baisse considérable de la valeur externe du franc (ancien) : la livre britannique n'a perdu "que" 98,6% de sa valeur au XXe siècle, et surtout le dollar 84%. En sens inverse, je manque d'espace pour mesurer la dépréciation du mark !
Vision plus rose : entre la naissance de mes parents et la mienne, le franc a perdu 98% de sa valeur ; et 80% entre ma naissance et celles de mes élèves actuels de l'X. En revanche (et si tout va bien) ils n'auront vu que 45% d'inflation avant la naissance de leurs enfants. En dérivée seconde, le franc se porte de mieux en mieux, on le voit.
Que voulez-vous dire exactement ? Il y a un message à faire passer que je n'ai pas compris ?
Rédigé par : Laurent | 03 juillet 2006 à 14:23
J'imagine que le message est que les générations précédentes étaient habituées à une hausse assez forte et continue des prix, et ne criaient pas à la catastrophe à la moindre augmentation des prix (qui est aussi un signal économique quant à l'opportunité d'augmenter les capacités de production).
Bernard Salanié souligne ainsi que cette inflation persistente ne semble pas avoir amené une paupérisation massive des ménages, sauf les quelques rentiers que, suivant Keynes, on ne regrettera pas. Là où il est un peu de mauvaise foi, c'est que la « modération salariale » en vigueur en France depuis les années 1980, concrêtement une stagnation prononcée des salaires nominaux, signifie que le moindre point d'inflation supplémentaire se traduit dans le pouvoir d'achat.
Comme il l'a déjà souligné cependant, il existe un effet psychologique faisant que les individus sont plus sensibles aux hausses de prix qu'aux baisses.
Rédigé par : leconomiste | 04 juillet 2006 à 11:24
Bernard Salanié s'est quelque peu laissé emporter par sa plume en parlant de "certains vieillards chenus" et de "subrepticement" à propos du passage au "nouveau franc" de 1960. Il suffit d'avoir au moins 55 ans environ pour se souvenir de cet évènement qui est loin d'être passé inapperçu à l'époque. Je qualifierais son retentissement de comparable à celui du passage à l'euro. Idem pour la persistance des anciens repères : le "million ancien" a longtemps continué à servir de référence pour ceux qui ne manipulent pas ce genre de sommes tous les jours, et persiste même aujourd'hui. Je pense que le fait qu'il n'y avait pas besoin de calculette (pas encore inventée) pour faire la conversion a plutôt favorisé la persistance des anciennes références.
A part ça, quel est le message, s'il y en a un ? Qu'une inflation importante est historiquement le cas le plus fréquent ? Les choses auraient-elles vraiment changé ?
Rédigé par : Jean V | 07 juillet 2006 à 13:43
Je ne cherchais pas particulierement a relier ce billet au precedent. Je constate en enseignant l'economie que pour mes etudiants, l'inflation n'est vraiment pas une preoccupation majeure, alors qu'elle dominait les pages des journaux quand j'avais leur age. "Une inflation importante est historiquement le cas le plus fréquent" : certes non. L'inflation (si on met de cote les variations de prix parfois fortes liees aux recoltes) etait un phenomene rare jusqu'a l'arrivee de l'or et de l'argent de l'Amerique espagnole au XVIe siecle. Ensuite les prix sont restes presque stables---encore une fois, en faisant abstraction de la Revolution et de ses guerres par exemple ; et une periode d'inflation etait souvent suivie d'une periode de deflation. Le XXe siecle en France constitue une anomalie en ce que l'inflation y a toujours ete positive, parfois tres forte.
Je pensais naivement que les chiffres etaient interessants aussi... exercice : calculet les rendements d'un placement en emprunts du Tresor americain de 1900 a 2000, par rapport au placement favori des Francais, la presse corrompue par le tsar aidant---l'emprunt russe !
Et prevenez-moi quand vous aurez fini d'aligner les zeros... :-)
Rédigé par : Bernard Salanie | 07 juillet 2006 à 14:44
Pour l'emprunt russe, je sais. Mon arrière grand-père avait revendu tout son patrimoine (deux petites maisons de corons, les économies d'une vie) pour acheter des emprunts russes. Quelques 80 ans plus tard, en contrepartie de ceux-ci, ma famille a reçu du gouvernement russe la somme d'environ 5000 FRF. Ce qui fait de l'emprunt russe un meilleur placement que le franc, mais certainement plus mauvais que le T-bond.
Rédigé par : econoclaste-alexandre | 09 juillet 2006 à 18:09
C'est une question de point de vue : on peut également dire que l'ajustement de la masse monétaire sur la quantité d'or sortie d'une mine est une anomalie au vue des qualités d'une monnaie. Le système actuel n'a aucune raison de générer de phase de déflation après une période d'inflation et c'est tant mieux. Cela n'affranchit bien sur pas les autorités monétaires de leurs responsabilités...
Rédigé par : jmatt | 10 juillet 2006 à 01:36
Très honnêtement, je n'ai toujours pas trouvé de mécanisme redistributif plus efficace que l'inflation. Si on considère d'une part l'importance de savoir redistribuer les profits de la croissance pour garantir la paix, et d'autre part le coût prohibitif d'une gestion publique de cette redistribution pour une efficacité somme toute douteuse, j'avoue réellement me demander s'il existe un meilleur gouvernement que l'inflation dans une économie libérale.
Rédigé par : Golfeur | 11 juillet 2006 à 04:12
g une recherche sue le prix nobel de l'economie en 2006 mais g rien trouvé please aidez moi
Rédigé par : meriem | 10 décembre 2006 à 06:05
Message pour Mr Bernard SALANIE ( et d'autres le cas échéant... )
Vous devez continuer à vous battre pour une indemnisation qui ne sera pas une insulte pour vos parents : 5000 fr soit 1% de la valeur de vos emprunts russes ? Rejoignez-nous
Rédigé par : Richelieu-Laplace | 20 janvier 2007 à 12:59
l'adresse des porteurs d'emprunts russes :
http://empruntsrusses.winnerbb.com
inscrivez-vous : c'est gratuit
Rédigé par : Richelieu-Laplace | 22 janvier 2007 à 05:27