J'ai oublié JSM !

...et pourtant, c'était sur mon agenda : John Stuart Mill est né le 20 mai 1806, il y a deux cent ans. Il me pardonnera, il n'était pas rancunier. Je pourrais parler de sa contribution d'économiste, qui n'est pas si mince : il a compris le premier comment se formaient les termes de l'échange international---voir le chapitre 6 de mon livre pour un exemple numérique parfaitement limpide---mais surtout, il a éduqué des générations d'étudiants (au sens large) à travers ses Principes d'économie politique, parus en 1848 et qui sont restés la Bible jusqu`à Marshall en 1890, et même souvent après. Il y a aussi le JSM  logicien, dont je ne connais pas grand chose. Mais c'est au grand penseur libéral que je voudrais rendre hommage.

 

Ergo et toutes affaires cessantes, jetez-vous sur On Liberty, dans la langue que vous voudrez. (Jetez-vous s'il vous plait---restons libéral).  C'est un exposé limpide et admirablement bref des principes de base du libéralisme politique classique, celui de 1859, dont l'inspiration "utilitariste" peut être résumée par cette phrase :

   

Mankind   are greater gainers by suffering each other to live as seems good to   themselves, than by compelling each to live as seems good to the   rest.

Mais la liberté se justifie aussi par des principes plus élevés ; en ces temps où on parle de plus en plus souvent d'inscrire dans la loi les articles de l'historiquement correct, il est  bon de méditer ce que JSM écrivait sur la liberté d'expression :

 

If all mankind   minus one, were of one opinion, and only one person were of the contrary   opinion, mankind would be no more justified in silencing that one person, than   he, if he had the power, would be justified in silencing mankind.

Ce credo politique s'étendait au domaine économique, pour des arguments moins techniques que fondés sur une inquiétude quant aux effets à long terme du tout-Etat :

 

Every function superadded to those already exercised by the government,   causes its influence over hopes and fears to be more widely diffused, and   converts, more and more, the active and ambitious part of the public into   hangers-on of the government, or of some party which aims at becoming the   government.

 

[…]

 

And the evil would be greater, the more efficiently and scientifically   the administrative machinery was constructed--the more skillful the   arrangements for obtaining the best qualified hands and heads with which to   work it.

(Ce deuxième paragraphe semble s'appliquer directement à l'administratoion francaise...)

 

JSM était très progressiste en ce qui concerne la cause des femmes, voir On the Subjection of Women; je n'en citerai que le dernier paragraphe :

 

When we consider the positive   evil caused to the disqualified half of the human race by their   disqualification — first in the loss of the most inspiriting and elevating   kind of personal enjoyment, and next in the weariness, disappointment, and   profound dissatisfaction with life, which are so often the substitute for it;   one feels that among all the lessons which men require for carrying on the   struggle against the inevitable imperfections of their lot on earth, there is   no lesson which they more need, than not to add to the evils which nature   inflicts, by their jealous and prejudiced restrictions on one another. Their   vain fears only substitute other and worse evils for those which they are idly   apprehensive of: while every restraint on the freedom of conduct of any of   their human fellow-creatures (otherwise than by making them responsible for   any evil actually caused by it), dries up pro tanto the principal fountain of   human happiness, and leaves the species less rich, to an inappreciable degree,   in all that makes life valuable to the individual human being.

Enfin, troisième livre (toujours bref) à lire : son émouvante Autobiography, qui devrait guérir même les plus cérébraux de tout "systèmisme".

 

 

Powered By Qumana

Comments

[Rédigé par : On va dire que c'est sans importance]

Même si je n'ai aucun moyen d'en juger, ceux en qui on a d'ordinaire confiance pour en juger disent que vous êtes un grand économiste français de votre temps, ce qui donne à votre parole aurpsè de certains publics une autorité que n'aura jamais celle d'un bézin de passage.

Que devrait dire un économiste à celui par ailleurs économiste qui envisage, de bonne foi assure-t-il, être de quelque utilité à la société, l'humanité en général qu'importe en envisageant de mettre toute l'énergie et le talent dont il dispose certainement, aidé en cela par le travail de ses honorés professeurs au seul service de l'état de son pays de naissance ?

[Rédigé par : sandra]

mes vous etes tous fou ou koi ojourdhui entre vous pui l'autre et sont cpe ou encore le cne ki veu encore faire un manifesttation sa va c'bon je pense

[Rédigé par : Nade]

J'ai rien compris au deux commentaires precedent , mais JSM etait effectivement un grand homme!

[Rédigé par : Pancho Villa]

'...restons libéral...'

Ou? Aux EU ou en Europe? (car le terme a une toute autre signification selon ou l'on se trouve...)

[Rédigé par : Bernard Girard]

Pourquoi les deux sens du mot libéral (sens économique et politique) paraissent-ils si bien aller ensemble au 19ème siècle et si mal aujourd'hui? Qu'est-ce qui s'est passé? Est-ce que les amis de la liberté ont du, à un moment, choisir de faire alliance
- avec les plus conservateurs et les plus autoritaires pour faire avancer leurs idées sur le plan économique?
- avec les plus favorables à l'intervention de l'Etat pour faire avancer leurs idées sur les moeurs ?
Ne pouvant faire le grand écart, il leur a fallu choisir, le jeu des alliances de circonstance poussant les uns (en Europe avec une économie depuis très longtemps administrée qu'il fallait libérer) vers la droite, les autres (aux Etats-Unis, pays de liberté économique mais de grande rigidité et conservatisme moral) vers la gauche.
Si l'on entre un peu plus dans le détail (ce que j'ai fait il y a quelques années à l'occasion d'un livre sur les théories du management en France) l'opposition pour ce qui est de la France me parait être plutôt passée entre les ingénieurs liés à la fonction publique (des Ponts type Dupuit, Cheysson et plus près de nous Boiteux, Lesourne) qui ont compris la grande entreprise et les libéraux classiques (type Blanqui, le frère du révolutionnaire) qui ne comprenaient vraiment que les PME).