Les jeunes générations ne le savent probablement pas : c'était le nom d'un projet de loi du ministre de l'intérieur Alain Peyrefitte en 1977. A l'époque, il avait déclenche une levée de boucliers contre ses mesures "liberticides". On en est bien loin aujourd'hui : quelques centaines de jeunes brûlent des voitures et le Parlement accepte gaiement de prolonger l'état d'urgence pour trois mois. D'où mon choix de la citation du jour, qui date des démêlés de Benjamin Franklin avec le gouverneur de Pennsylvanie en 1755---elle est inscrite sur le piédestal de la Statue de la Liberté, cadeau des Francais au peuple américain en d'autres temps :
Those who would give up essential Liberty, to purchase a little temporary Safety, deserve neither Liberty nor Safety.
« Those who would give up essential Liberty, to purchase a little temporary Safety, deserve neither Liberty nor Safety »
C'est pour le Patriot Act que vous citez cela ?
Rédigé par : all | 21 novembre 2005 à 03:04
J’ai trouvé une invit sympa, moi en tout j’y serai… c’est la Fondation pour l’innovation politique qui organise un débat sur le thème « À qui profite la thèse du déclin de la France ? » le mercredi 23 novembre 2005 organisée à l'occasion de la sortie en France des ouvrages : Le Siècle de Monsieur Pétain. Essai sur la passion identitaire d’Alain-Gérard SLAMA, La France qui gagne de Nicolas et Guéric JACQUET et Pas si fous, ces Français ! de Julie BARLOW et Jean-Benoît MADEAU, avec la participation de Paul-Marie COÛTEAUX , Député européen.
Leur site : www.fondapol.org
@+
Rédigé par : axel | 21 novembre 2005 à 09:42
essayer ce blog
www.lafrancequigagne-leblog.com
Rédigé par : axel | 21 novembre 2005 à 09:43
Sans tomber dans le populisme, il est vrai qu'il est plus facile de s'indigner des mesures soi-disant "liberticides" du gouvernement quand on est à Columbia que quand on vit dans les quartiers sensibles. J'aimerai que vous m'expliquiez quelles libertés sont remises en cause par l'application de la loi de 1955 en France ? Vous savez très bien qu'elle n'est appliquée qu'avec parcimonie, en accord avec le préfet et le maire. Votre discours est purement idéologique.
Rédigé par : Le Biez | 21 novembre 2005 à 09:44
* all : le Patriot Act est effectivement bien dote en mesures liberticides. Il a ete vote dans les semaines qui ont suivi le traumatisme du 11 septembre, ce qui n'est pas une excuse. En tout etat de cause, les vices des uns ne devraient pas servir d'excuse aux autres.
* Le Biez : "en accord avec le prefet et le maire", c'est amusant. Le prefet est le representant du gouvernement et obeit aux ordres ; le maire est a la fois elu et fonctionnaire, statut baroque qui reflete nos vices passes. Et "elle n'est appliquee qu'avec parcimonie"... quelles sont les garanties ?
Rédigé par : Bernard Salanie | 21 novembre 2005 à 23:47
Il me paraît superficiel d'opposer la "Sécurité" à la "Liberté". Ce qu'il est intéressant de regarder, ce sont les conséquences concrètes sur les individus. Par exemple, pour l'état d'urgence, il faut d'abord évaluer l'efficacité du dispositif (ce qui est quasiment impossible si l'on s'en tient aux informations de la presse) et pondérer celle-ci par la probabilité que les émeutes soient de retour dans les mois qui viennent.
Ensuite, il faut comparer tout cela avec la perte de bien-être occasionné par 1) l'application concrète du dispositif (devoir rentrer chez soi tôt quand il y a des émeutes dans la rue ne doit pas être vraiment déprimant, sauf pour les fauteurs de trouble), 2) l'effet symbolique éventuel de la mise en oeuvre de l'urgence, et notamment la possible banalisation des atteintes à la liberté, banalisation qui pourrait avoir des effets néfastes dans le futur.
Pour ma part, je suis sceptique quant à l'efficacité du dispositif, mais également très sceptique quant à ses conséquences néfastes, donc je n'ai pas trop d'avis sur la question, ou plutôt, mon avis est qu'il ne faut pas en faire tout un foin. Vous me paraissez donc dramatiser inutilement les choses, et de façon très peu rigoureuse de sucroît, ce qui est un peu décevant pour le brillant économiste que vous êtes.
Rédigé par : Xavier | 22 novembre 2005 à 11:53
Xavier, on ne peut pas appliquer l'analyse coûts-bénéfices à tous les domaines ; ou alors il fait le faire en prenant en compte que quand un gouvernement respectueux du droit décide de restreindre les libertés, il crée un précédent qui peut être utilisé plus tard par d'autres, moins dignes de confiance.
Pour pousser les choses à l'extrême : dans le fameux exemple du terroriste qui a été arrêté après avoir mis une bombe quelque part, on pourrait arguer très "concrètement" que le torturer pour le faire avouer a des bénéfices qui dépassent les coûts, et qu'on peut faire confiance au gouvernement *actuel* pour 1) n'appliquer que "le minimum de pression nécessaire", comme disent les mémos de l'administration Bush 2) ne plus avoir recours à la torture que si un cas aussi extraordinaire se reproduisait. L'ennui, c'est qu'une fois qu'on s'habitue à ce genre de procédé, on le banalise ; et ce qui était exceptionnel peut devenir une habitude, surtout quand une majorité se retrouve d'accord pour opprimer une minorité. D'où la nouvelle citation du jour :
"If men were angels, no government would be necessary. If angels were to govern men, neither external nor internal controls on government would be necessary. In framing a government which is to be administered by men over men, the great difficulty lies in this: you must first enable the government to control the governed; and in the next place oblige it to control itself. A dependence on the people is, no doubt, the primary control on the government; but experience has taught mankind the necessity of auxiliary precautions."
(James Madison, Federalist Paper numéro 51, 1788).
Rédigé par : Bernard Salanie | 26 novembre 2005 à 10:16
Je suis tout à fait d'accord, et c'est exactement ce dont je parlais lorsque je mentionnais une banalisation potentiellement néfaste de la pratique en question.
Votre argument est recevable car il est explicitement conséquentialiste (par opposition au moralisme primaire que constituent les arguments déontologiques). C'est parce que ce type d'arguments manquait dans votre première intervention que je l'ai contestée.
S'agissant de la torture, le rapport coût-bénéfice d'inscrire la possibilité de la torture dans la loi pour un cas aussi rarissime me paraît, pour les mêmes raisons que vous, plaider contre celle-ci. Je suis en revanche favorable, au risque de paraître horriblement cynique, à la pratique effective - en l'absence de textes - d'une forme de torture pour faire parler l'individu si ce type de cas survenait.
Et depuis que je regarde la série "24", je ne pense plus être totalement seul à penser de la sorte. Dans cette série qui connaît un succès planétaire, le gouvernement pratique la torture sans vergogne pour désactiver menaces d'effacement de la carte d'une grande ville ou de ses habitants par une bombe nucléaire ou par la prolifération d'un virus.
Lorsque l'on met en balance de façon très concrète la souffrance quasi-certaine de millions d'habitants et la souffrance d'un seul individu (torturé), il devient très difficile de finasser sur les principes et de ne pas tomber d'accord avec l'utilitarisme. Je me permets donc de vous conseiller, pour vos citations, un peu plus de Bentham, de Mill ou de Posner, et un peu moins de founding fathers.
Rédigé par : Xavier | 26 novembre 2005 à 11:23
Xavier, vraiment, vous m'inquietez. J. S. Mill est un de mes heros, et je pense que vous aurez du mal a trouver une ligne de lui qui justifie l'usage de la torture. Bentham est un cas plus complique, qui a derive vers le delire repressivo-philanthropo-dingo du Panopticon. Quant a Richard Posner, il adopte effectivement une position qu'il decrit comme pragmatique : 1) dans le scenario de la 'ticking bomb', la torture sera utilisee de toute maniere ; 2) il est preferable de l'admettre des maintenant et de l'encadrer pour qu'on n'en abuse pas ; 3) en tout etat de cause, il est sans doute preferable et plus efficace d'utiliser des drogues que des tenailles ou des brodequins. 1) est sans doute exact ; 2) est plus douteux---va-t-on nommer une commission de sages independants (c'est-a-dire, en pratique, nommes par le pouvoir du moment), qui assisteront aux interrogatoires pour les "encadrer" ? Qui voudra en faire partie ? et 3) me ferait plaisir mais tient sans doute a moitie du voeu pieux.
Rédigé par : Bernard Salanie | 28 novembre 2005 à 22:24
Le point commun entre Bentham, Mill et Posner est qu'ils sont utilitaristes, c'est à dire qu'ils jugent les pratiques politiques en fonction de leurs effets sur le bien-être des individus.
Dans ce cadre, on peut tout à fait diverger sur la question de savoir s'il est préférable d'encadrer / pas encadrer la torture, s'il est plus efficace d'utiliser des drogues ou non ; il s'agit de questions empiriques sur lesquelles je ne suis pas assez qualifié pour me prononcer de manière affirmative.
Ce dont je suis certain, en revanche, c'est que je suis favorable - et de façon inconditionnelle - à la torture effective dans le cas décrit dans l'épisode 3 de la série 24 (cela peut paraître trivial d'évoquer une série télé sur un tel sujet, mais cela permet à ceux qui l'ont vu de visualiser l'ensemble des circonstances du cas en question). Il s'agit d'éviter qu'un virus se répande dans plusieurs grandes villes, virus qui ne tue pas seulement ceux qu'il touche, mais qui les fait mourir dans d'atroces souffrances. Dans un tel cas, toutes les réserves (conséquentialistes) qui pourraient valoir dans d'autres cas s'effacent devant une équation simple : il s'agit de choisir entre la souffrance certaine d'un individu (torturé) et l'extrême souffrance quasi-certaine de millions de personnes.
J'avoue ne pas vraiment comprendre pourquoi choisir la première solution paraît "inquiétant". Pour ma part, ce sont ceux qui choisiraient la seconde solution qui seraient susceptibles de m'inquiéter !
Un mot sur Bentham, pour finir. Je remarque avec tristesse que la vulgate a gagné, puisque même vous reprenez sans aucun recul la vision foucaldienne - pourtant parfaitement erronée - du benthamisme. Un ouvrage (dont je suis l'auteur) paraîtra dans quelques mois sur l'utilitarisme pénal ; peut-être vous fera-t-il changer d'avis sur Bentham et l'utilitarisme !
Rédigé par : Xavier | 29 novembre 2005 à 18:22
Comme promis, paraîtra dans deux semaines un ouvrage de réhabilitation de l'utilitarisme et du benthamisme ! Voici le site qui lui est associé : http://utilitariste.canalblog.com/
Rédigé par : Xavier | 22 avril 2006 à 04:15