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En exergue :

  • Frank Ramsey, "Truth and Probability" (1926)
    The highest ideal would be always to have a true opinion and be certain of it; but this ideal is more suited to God than to man.
  • Jules Bertaut, "1848 et la Seconde République" (1937)
    L'enthousiasme est pour rien chez nous : aussi les Français, peuple avare par excellence, le répandent-ils avec une générosité qui n'a d''egale que leur versatilité.
  • Turgot, lettre à Du Pont (1773)
    C’est au public lisant et réfléchissant qu’il faut parler, c’est à lui qu’il faut plaire, lui et lui seul qu’il faut persuader ; toutes les flagorneries aux gens en place, tous les petits détours dont en s’enveloppe pour ne pas les choquer sont une perte de temps écartant du vrai but et ne réussissant même pas à faire sur eux l’impression qu’on s’est proposée.

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Commentaires

M LeMaudit

Quelques petites remarques en passant:
-le français est l'une des trois langues officielles de la Convention sur le Brevet Européen, vous pouvez vous épargner les citations en anglais
http://www.european-patent-office.org/legal/epc/f/ma1.html#CVN
-les actes communautaires comme l'avis du Parlement européen en 1ère lecture que vous citez existent aussi naturellement tous en version française.
-Vous parlez inexactement du "Conseil Européen", alors qu'il s'agit, erreur classique, du "Conseil" (tout court). Le premier réunit de temps en temps les chefs d'Etats et de gouvernement pour donner des impulsions politiques, le second est le législateur de l'Union (avec le Parlement).

Sinon, c'est très intéressant d'avoir l'avis d'un économiste sur la question, et si j'osais, je vous demanderais bien de développer sur "les arguments économiques qui font des brevets des éléments nécessaires (ou pas) de l'incitation à l'innovation, spécifiquement dans le domaine des logiciels". Ramassage des copies dans 6 heures :)

(J'en avais un peu parlé moi aussi avant de ma rappeler la promesse que je m'étais faite de ne *jamais* aborder de sujet serieux sur mon blog, mais il reste juste quelques éléments sur la page que je mets en lien)

Bernard Salanié

Ah, me faire taper sur les doigts, quel plaisir...(un plaisir que j'inflige plus souvent aux autres). Je préfère mettre les documents en français, mais je refuse de passer plus de cinq minutes à les chercher.

M LeMaudit

My pleasure :-p

guerby

Un grand merci pour ce billet :). Plusieurs points qui peuvent vous interesser

- C'est ici qu'il faut voter (si vous connaissez des PMEs) : http://www.economic-majority.com/

- La position du conseil (plus il y a de brevet sur tout mieux c'est) est basée sur les travaux d'un économiste http://www.sussex.ac.uk/Units/SEI/people/holmes.html le résumé de sa position http://europa.eu.int/comm/internal_market/en/indprop/comp/ et le document complet http://europa.eu.int/comm/internal_market/en/intprop/indprop/study.pdf

- Les PMEs européennes du logiciel sont (evidemment) majoritairement contre une directive censer les aider, voir ces deux enquetes http://wiki.ffii.org/Ifis050404En et http://wiki.ffii.org/SiEconom0503En

- La décision de la cour supreme des USA (Diamond v. Diehr) n'autorise pas de manière évidente les brevets sur les logiciels "purs" (le cas implique une machine à chauffer le caoutchouc controlée par un logiciel qui exécute un algorithme bien précis).

- L'inde vient de refuser clairement l'extension de la brevetabilite aux logiciels.

- Le cas de SCO est basé sur le droit des contrats (et eventuellement sur le droit d'auteur) mais pas sur le droit des brevets. Tout ca est typiquement obscurci derriere "violation de propriete intellectuelle" qui ne veut rien dire tant les monopoles garantis par l'état regroupés sous le vocable "propriete intellectuelle" sont de fonctionnement et de portee differents.

- En discutant avec des économistes dans d'autres forums j'ai du mal à faire passer mes idées sur le sujet qui se basent sur mes connaissances de praticien (informatique financiere) et qui rejoignent certaines de vos remarques :

1. Un médicament qui rapporte des milliards est protégé par un seul brevet qui dit tout sur le sujet et est connu de tous les acteurs du secteur. En informatique il y a sans aucun doute de 100 a 1000 brevets/algorithmes qui peuvent se retrouver dans tout logiciel significatif. De maniere evidente (pour moi, pas pour les économistes), cela rends immédiatement tres couteux le fait de jouer "honnete" avec le systeme, il faut auparavent identier ces nombreux brevets, prendre contact avec leurs detenteurs, négocier une licence et faire valider cette licence par des juristes. Le simple bon sens dit qu'au dela de 2 ou 3 brevets sur une invention, peut etre 10 ca ne marche plus, ou alors seulement via des grosses entreprises qui de toutes facons se licencie de maniere croisee leur portefeuilles de brevets respectifs (uniques beneficiaires

2. La duree de protection (20 ans) est inadaptee au monde du logiciel actuel. Hors si on reduit la duree de protection, il faut aller aussi plus vite pour valider les brevets ce qui entraine un surcout enorme pour les offices des brevets. Comme vous l'avez précisé il est aussi evident qu'une administration n'arrivera pas à recruter des personnels suffisament compétents et motivés pour se pencher sur l'horrible langage juridique d'un brevet logiciel pour un salaire de fonctionnaire. Et si l'administration etait capable de recruter de tels genies a si peu de frais, pourquoi laisser travailler le privé dans le domaine ? :). Une petite nuance a vos propos, il me semble que les offices des brevets rapportent de l'argent aux

3. L'innovation dans le logiciel est surtout incrémentale, en plein dans les détails de l'implantation et de son adéquation avec les besoins spécifiques de l'utilisateur final et les brevets (en nombre) inhibent ce type d'innovation la. Ensuite 80-90% des praticiens du secteur travaillent non pas chez des editeurs qui vendent des logiciels en supermarché (qu'on nous présente pourtant comme étant "l'informatique" a sauver avec des brevets) mais font du sur mesure pour un seul client, et la aussi les brevets genent plus qu'autre chose.

4. De maniere generale une protection juridique trop forte dans le domaine du logiciel, droit d'auteur ET brevets par exemple sur les interfaces, protocoles et formats de fichiers, finit par desinciter a la qualite et l'innovation (le "vendor lock-in" et "forced update" au detriment du serieux du support client), un sujet plus vaste :). Un article amusant sur le sujet http://www.developerpipeline.com/showArticle.jhtml?articleId=161601769

La réponse standard est que la théorie générale s'applique partout, il faut absolument inciter a l'innovation (voir papier générique sur le sujet), il faut donc des brevets y compris pour les logiciels (pas d'exceptions suspectes), et non vous n'avez rien compris a l'économie de l'innovation et des PMEs. Et il parait que le papier de l'économiste pour la commission prouve l'intéret des brevets logiciels pour les PMEs, mais il me semble plus se baser sur un dogme général qu'autre chose.

Au passage, la position de l'INPI francais est bien sure très pro-brevet logiciel, pour aider les PMEs francaises du logiciel bien sur, donc rien de bien spécifique a l'Europe.

La grande question, si le legislateur arrive a passer une loi claire qui interdit les brevets ou si avec la loi actuelle une jurisprudence de meme nature s'etablit est qui va payer pour nettoyer les brevets logiciels existants en Europe ? 30 000 proces dans 25 pays = 750 000 proces ? Pour reference je crois qu'il y a 10 cours qui sont habilitees en pratique a traiter des affaires de brevet en France ...

Laurent

Bernard Salanié

J'ai regardé le rapport pour la Commission de Peter Holmes et al. En préambule, je suis choqué de la méthode qui consiste faire appel à trois économistes inconnus (pas de publication de bon niveau), dont un fait parti d'un "Institut sur la Propriété Intellectuelle" et doit donc avoir quelques a priori sur la question. Il ne manque pourtant pas de bons économistes indépendants en Europe...

Sur le fond, les arguments de ce rapport sont vraiment faibles. "Certes, l'industrie du logiciel a connu sa plus forte explosion avant l'utilisation des brevets, mais il y a des anecdotes qui suggèrent que c'est mieux avec" ; "bien sûr, des brevets abusifs ont été enregistrés aux Etats-Unis, mais on fera mieux en Europe", etc etc. On se moque un peu du monde.

La théorie générale dit qu'il y a un arbitrage entre la protection des droits de propriété sur les innovations (pour créer des incitations à la recherche et développement) et le souhait que ces innovations se diffusent aussi rapidemnt que possible. Il n'y a aucune raison que les termes de cet arbitrage soient invariants dans le temps ou entre secteurs. Et je pense qu'il y a de bons arguments pour dire que la protection doit être moins stricte dans le secteur du logiciel.

guerby

Merci pour votre réponse. Si vous avez des references d'economistes europeens interesses par le sujet, je suis preneur. Je suis allé par curiosité à la conférence "Third bi-annual Conference on the Economics of the Software and Internet Industries" en janvier a Toulouse http://www.idei.fr/activity.php?a=2926 et j'ai été très surpris du traitement totalement générique du problème des brevets logiciels par les économistes présents, malgré la présentation éloquente du "speaker" de l'industrie de la standardisation des protocoles Telecom qui a dit clairement la catastrophe pratique que representait les brevets dans ce domaine et dans sa (longue) expérience.

Sur l'Europe, en pratique la commission choisissant son "expert" pour le rapport préalable a une loi bien evidemment choisit ce qu'elle veut entendre et a toute latitude pour ignorer tout le monde durant toute la procédure de codécision (incluant pétition et parlement). Si ca ne passe pas a la fin, ce n'est pas grave on repassera une variante jusqu'a que ca passe par lassitude ... Malheureusement le "non" ne sauvera pas le domaine de la propriete intellectuelle de ce travestissement de la democratie, mais au moins ca empechera une extension de l'horreur a d'autres domaines, au moins temporairement.

J'ai oublie de terminer une phrase dans mon message :

"Une petite nuance a vos propos, il me semble que les offices des brevets rapportent de l'argent aux" Etats ce qui expliquerait un silence complaisant des politiques. En effet, un office des brevets est payé au nombre de brevet déposés, il est donc trivial de voir que l'incitation de ce systeme n'est pas a moins de brevet de meilleure qualité (augmentation des couts pour moins de revenu car plus de rejet), mais bien a un controle nul de qualité pour faire du chiffre (augmentation des revenus et diminution des couts). A personnel constant ou presque le nombre de brevet a explosé, ce qui me parait coherent avec une manne financiere discrete qui n'incite pas le politique a mettre le nez dans la cuisine et les derive de ces administrations.

Laurent

Econolaste-SM

"Malheureusement le "non" ne sauvera pas le domaine de la propriete intellectuelle de ce travestissement de la democratie, mais au moins ca empechera une extension de l'horreur a d'autres domaines, au moins temporairement."

Attention : le terme "horreur" quand il s'agit d'économie peut vous conduire très vite à un point Godwin (si, si... horreur -> sang -> génocide -> nazis, c'est une réthorique utilisée par les rouges-bruns pour condamner ce qu'ils appellent "libéral"). Ou, pire, à Viviane Forrester...

guerby

Horreur se referrait a "travestissement de democratie" (dans le sens commission sans contre pouvoir representatif effectif), pas au debat brevet logiciel vs "economie", desole si ce n'est pas clair dans ma phrase.

Ceci dit les brevets logiciels et methode d'affaire sont bien proche d'une "horreur" au niveau economique (je suis totalement objectif :), c'est juste qu'une petite minorité d'economistes le pense et encore moins l'ecrivent et prennent leur plume pour denoncer publiquement les travaux "baclés" d'un collegue sur le sujet. Pour le reste c'est limpide brevet illimité c'est cool sinon zero innovation n'est possible, quelque soit le domaine, pas d'exception, merci, au revoir.

Laurent

Econoclaste-SM

Sur la démocratie, l'UE et la Commission, je ne vais pas démarrer un débat, mais bon, je ne souscris pas à l'utilisation du terme "horreur" dans ce contexte. Pourmoi, l' "horreur", c'est l'Afrique, la Corée du Nord etc. Dans "travestissement" et "horreur", il y a une connotation intentionnelle qui ne me convient pas, dans la mesure où je ne suis pas adepte des théories du complot. Si ça veut dire qu'il y a des progrès, voire conséquents, à accomplir, ok.

"c'est juste qu'une petite minorité d'economistes le pense et encore moins l'ecrivent"

Je n'ai pas fait de "sondage", donc je ne saurais dire si la première assertion est exacte. Disons que chez les économistes que je lis, je n'ai jamais vu de défense unilatérale des brevets logiciel. Pour la deuxième, c'est probablement un peu plus vrai, si on suppose (comme je le fais) que la majorité des économistes (sérieux) n'y sont pas favorables. A vérifier... Mais, il n'y a qu'à lire la théorie économique standard sur la propriété intellectuelle pour se persuader qu'un économiste ne peut pas souscrire sans fortes réserves à l'idée de brevets logiciel.

Il est vrai que l'enjeu est plus qu'important et il serait bon d'en parler plus. Mais, au fond, les économistes sont à l'image de la société sur ce point. Quand on y réfléchit bien, compte tenu de l'importance du logiciel, on n'en parle pas assez. Le coût d'entrée technique élevé dans le débat en est-il une cause ? Il me semble que les gens retiennent deux idées : un inventeur doit être protégé ; on ne doit pas empêcher les idées de circuler. Et ensuite, chacun choisit un camp. Ce qui donne lieu à des points de vue simplistes, d'autant que c'est toujours rattaché à d'autres aspects sans pertinence réelle (genre : "tout est cher dans ce pays => je pirate" ou "on ne valorise pas le travail => je soutiens M$").

Denys

Comme le rappelait Bernard Salanié, et c'est quelque chose que l'on lit assez rarement, toute la question du brevet logiciel en Europe part du coup de force de l'OEB, qui visait clairement à la fois à générer du chiffre d'affaires pour lui et ses agents, et du contentieux pour les cabinets spécialistes de propriété intellectuelle, auquel il est nécessairement lié. J'en parlais dans un article plus tout jeune, mais à priori assez exact à l'époque : http://www.sig-11.org/articles/brevets_logiciels.html

Aujourd'hui, l'implication des Nokia, Alcatel ou Ericsson dans l'affaire, dont on peut comprendre, au vu des emplois qu'ils représentent, que leurs intérêts pèsent plus pour les institutions européennes que ceux des développeurs de KDE ou Mandriva, conduit au paradoxe que cette implication risque de mettre à mal les positions des opposants aux brevets alors même que, à ma connaissance d'ailleurs assez limitée, ces entreprises ne vendent pas de logiciels en tant que tels, mais des matériels utilisant des logiciels.
En d'autres termes on devrait, et tel me semble être le sens de la tentative de Michel Rocard, pouvoir réconcilier les deux : laisser le pur logiciel dans le champ du droit d'auteur, et permettre de breveter les éléments logiciels incorporés dans un matériel et indisociables de celui-ci. Mais ce n'est pas forcément simple.

Par ailleurs, la résistance s'organise aussi aux Etats-Unis, avec la Public Patent Foundation :
http://www.pubpat.org/News.htm
tandis que les développeurs OpenSource s'attachent, eux, à faire respecter leur droit d'auteur :
http://gpl-violations.org/index.html
Bon, évidemment, contre Aldi et Lidl, la partie n'est pas gagnée.

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