Depuis quelques années, les heureux contribuables peuvent déclarer leur impôt sur le revenu en ligne. On ne peut que saluer cette modernisation, que seul le Syndical National Unifié des Impôts regrette, témoignant ainsi de la persistance du Luddisme en France. C'est néanmoins l'occasion de souligner les différences entre pays.
L'auteur de ces lignes, dont les affaires sont un peu compliquées, a aujourd'hui fait sa déclaration aux Etats-Unis et essayé de la faire en France. Aux Etats-Unis, sur le site de l'Internal Revenue Service, surprise : l'IRS n'offre pas la possibilité de déclarer sur Internet ! En fait, un peu plus d'attention montre que l'IRS propose le service FreeFile. Une vingtaine d'entreprises privées proposent aux contribuables d'utiliser leurs sites Web gratuitement pour déclarer leurs impôts fédéraux, et transmettent le résultat à l'IRS. L'intérêt pour le gouvenement est clair, comme le site nous le dit :
The government believes a partnership with private industry will: provide taxpayers with higher quality services by using the existing expertise of the private sector; maximize consumer choice; promote competition within the marketplace; and meet objectives in the least costly manner to taxpayers.
Les entreprises, elles, espèrent faire plus que couvrir le coût de ce service en proposant la déclaration de l'impôt sur le revenu dû à l'état (New York dans mon cas), et en attirant les contribuables vers d'autres services payants. J'ai ainsi déclaré mon impôt sur le revenu au gouvernement fédéral, à l'état et à la ville de New York pour la modique somme de 9,95 dollars.
Qu'en est-il en France ? Fidèle à notre tradition, le Ministère des Finances a lui-même construit son site. Premier effet indésirable : comme c'est gratuit (et même subventionné à hauteur de 20 euros), il y a ce que nous autres économistes appelons un effet d'éviction : on voit mal une entreprise privée se présenter sur ce marché... Deuxième effet : si ce site ne marche pas, pas de site de rechange. C'est très exactement ce qui m'est arrivé, puisque j'ai obtenu ce message :
Déclaration en ligne : Vous êtes actuellement très nombreux à vouloir déclarer en ligne, ce qui occasionne des délais d'attente. Nous vous invitons à vous reconnecter ultérieurement.
Rien d'inattendu, pour un économiste tout au moins : le monopole bureaucratique conduit habituellement au rationnement. Dernier effet : le coût de ce genre de situation de blocage n'est pas internalisé par la Direction Générale des Impôts, alors qu'une entreprise privée qui fournirait un service aussi intermittent perdrait des clients. C'est d'ailleurs probablement la raison pour laquelle j'ai reçu ce message décourageant.
"Mais c'est un service public...", me dira-t-on. Je n'ai jamais très bien compris ce qu'est un service public ; je vois bien qu'il est souhaitable que certaines activités soient entreprises par l'Etat, mais je ne crois pas que la déclaration d'impôt en ligne en fasse partie. Si un lecteur voit un bon argument en sens contraire, je serais heureux de le connaître.
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